mars
2001
Chère Evelyne,
Je m'appelle Fantin et j'ai 10 ans. J'ai adoré votre livre
CHLAGANOIR, car il y a des moments de grand suspense, et les
chlaganoirs sont tellement marrants que j'aimerais bien qu'ils
existent !
J'ai quelques questions à vous poser :
1) Combien avez-vous écrit de livres ?
2) Est-ce votre premier livre pour la bataille des livres ?
3) Vouliez-vous devenir auteur quand vous étiez petite ?
4) A quel âge avez-vous écrit votre premier livre ?
J'attends votre réponse avec impatience.
Fantin
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Cher Fantin, ton message me touche beaucoup.
Sache que j'ai écrit plus de cinquante livres, car je suis déjà âgée, j'ai
61 ans... oui, 61... du moins, en apparence. Car comme tout le monde, j'ai
tous les âges à la fois... Bref, j'ai écrit beaucoup d'histoires mais
souvent courtes, car je m'adresse souvent aux petits lecteurs de 7 à 9 ans :
beaucoup d'auteurs pour jeunes aiment s'adresser à des lecteurs d'un âge
précis, peut-être parce que cela correspond à un moment de leur vie qu'ils
cherchent à retrouver ou à évacuer...
De plus, depuis 15 ans, je fais avec une amie le scénario de
"Tom-Tom et Nana", une bd qui a beaucoup de succès en France, presque autant que
"Titeuf" en Suisse !
C'est la première fois que je participerai à la Bataille des Livres mais
M. Beugger avait déjà pris contact avec moi il y a un an ou deux pour que je
vienne présenter "La Rédac" à des lecteurs de ton âge. C'est un roman
humoristique sur le thème du mauvais élève.
Quand j'étais petite, je n'ai jamais pensé devenir écrivain, je détestais
écrire, je faisais trois fautes par mot et j'étais en échec scolaire.
J'ai commencé à écrire des livres assez tard, à l'âge de 37 ans.
Bien amicalement,
Evelyne
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mars
2001
Bonjour,
Nous avons beaucoup aimé votre livre. Nous aimerions savoir comment vous
avez eu l'idée d'écrire ce livre.
Merci beaucoup.
La classe de Nicole Wasem (Vélodrome, Genève)
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Je suis heureuse que "Chlaganoir" vous ait plu. Pour écrire un livre, je
n'ai pas d'idée précise au départ, ce qui me vaut parfois des déconvenues.
Je suis un peu comme un chien qui flairerait une odeur attirante sans savoir
d'où elle vient. Je cherche, ce qui signifie que j'écris à l'aventure,
jusqu'à ce que je trouve un sens à mes lignes (parfois, et même souvent,
j'abandonne !). Pendant dix ans, j'ai pris et laissé "Chlaganoir". J'avais
plusieurs envies confuses : plonger au fond de quelque chose de sombre,
descendre, sans savoir où... parler des deux faces de moi-même (et peut-être
de beaucoup d'entre nous) : Marie et Mira... exprimer un sentiment que j'ai
souvent d'être piégée dans notre société de caméras, de sondages, de
statistiques, etc. Ce sentiment de n'être qu'un pion que l'on dirige a été
ravivé un jour où, dans un grand magasin, après avoir rempli mon caddie,
j'ai constaté que j'avais oublié mon porte-monnaie chez moi. Pour que je
puisse téléphoner à mon mari, on m'a conduite dans la salle de surveillance,
où un employé observait tous les clients à l'aide de caméras. Ca m'a
beaucoup impressionnée. Quand tout cela a pris forme, j'ai aussi pu dire ma
curiosité pour le monde de demain, que j'imagine très virtuel. J'ajouterai
que j'ai sûrement exprimé d'autres choses enfouies en moi dont je n'ai pas
vraiment conscience. Je ne sais pas si je suis claire, ni si j'ai bien
répondu à votre question.
Bien amicalement,
Evelyne
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mars
2001
Chère madame Reberg,
Bonjour, je m'appelle Christopher , j'ai dix ans, j'habite à Genève en
Suisse et je suis a l'école de Cointrin. J'ai vraiment aimé
votre livre, que dis-je, c'est le meilleur livre que j'ai lu de toute ma
vie (il aurait dû gagner 3 nominations aux oscars!). Ce qui m'a plu le
plus, c'est qu'il y a 200% de suspense. J'ai aussi aimé l'histoire des objets électroniques qui ciblent
parfaitement la vie du futur et en fait cette histoire n'était qu'un rêve.
J'ai tellement aimé votre livre que je voudrais savoir si vous allez faire un autre livre de ce type.
J'espère que vous allez me répondre rapidement. Je m'impatiente à
l'avance.
A bientôt
Christopher
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Cher Christopher,
Ton courrier m'a fait tellement plaisir que je l'ai aussitôt transmis à Guy
Jimenes, qui a écrit cette histoire avec moi. Mais vous savez, jeunes lecteurs, vous pouvez aussi me faire des critiques !
Un détail, Christopher : tu dis que cette histoire n'était qu'un rêve. En
réalité, on ne sait pas si elle est un rêve ou si tout cela a existé, puis a
été effacé. Le doute fait partie du récit du début à la fin. Cela rend
peut-être la lecture un peu compliquée et difficile pour certains d'entre
vous. Tu me demandes si je vais écrire un autre livre comme celui-ci. Disons que
cette histoire est le fruit de certaines obsessions que j'ai vraiment eues,
alors il faut que je fasse le plein de nouvelles obsessions, que je fasse
remonter en moi de nouvelles angoisses, pour pouvoir écrire un autre roman
semblable ! Ca viendra peut-être !
Bien amicalement,
Evelyne
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mars
2001
Bonjour, je m'appelle Lucien j'habite à Genève et je vais à l'école Trembley. Je n'ai pas aimé le livre "CHLAGANOIR" parce que je trouve qu'il
a de la science- fiction. Toutes les choses qu'on pouvait acheter me faisaient très envie. J'ai bien aimé les dessins des
Chlag. Je n'ai pas aimé le moment où les filles étaient enfermées dans un couloir.
Est-ce que vous avez écrit d'autres livres ?
Lucien
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Ah ! voici un lecteur critique ! Ca ne m'étonne pas, Lucien. Nous sommes
tous comme autant de petites planètes, je veux dire par là que nous sommes
tous si différents les uns des autres ! Il est fatal que les rêves des uns
ne rejoignent pas ceux des autres (car tout livre est un rêve, n'est-ce
pas ?) Quand j'écris une histoire, je tremble toujours en me demandant si
elle pourra toucher mes lecteurs, d'autant plus que j'ai une énorme
différence d'âge avec eux ! Et voilà : je tombe sur un lecteur qui n'aime
pas la science-fiction. C'était à prévoir. Je pense que tu n'aimes pas non
plus les livres qui angoissent, et ces deux filles enfermées t'ont procuré
des sentiments désagréables. Là, je te comprends : je déteste moi aussi les
livres, les films, qui jouent sur l'angoisse. J'ai peur d'avoir peur. C'est
un vieux réflexe qui remonte à l'enfance, j'ai eu suffisamment d'occasions
d'avoir de vraies terreurs quand j'étais petite pour ne pas avoir envie d'y
revenir ! Peut-être est-ce le cas pour toi aussi ! Voilà pourquoi
d'habitude j'écris plutôt des histoires drôles (comme La Rédac) car le
propre de l'histoire drôle, c'est de prendre du recul par rapport à
l'angoisse, de s'en défendre en quelque sorte. Avec ce livre, j'ai voulu
changer de registre. J'aimerais bien continuer dans cette voie malgré mes
réticences mais y parviendrai-je ? Je suis contente que les jouets du magasin souterrain t'aient fait envie:
cela prouve que j'ai réussi à te toucher, à t'embarquer un peu dans cette
histoire, malgré tout. En ce qui concerne les illustrations, tu me parles sans doute de
Judex, et tu as raison, il est très doué.
Bonnes lectures, Lucien, et merci pour ton message !
Evelyne
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mars
2001
Chère Madame,
Je m¹appelle Marvin, j¹ai lu votre livre et je vous dis franchement que ça manque d¹action. Vous auriez dû changer les filles par des garçons car je suis un garçon. A part ça j¹ai très bien aimé votre livre.
Qu¹est-ce qui vous a donné l¹envie d¹écrire ?
Marvin
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J'avoue que je ne comprends pas très bien ta lettre,
Marvin. Tu dis que ce livre manque d'action, donc il te déplaît ! Et ensuite tu dis que tu l'aimes bien... Vraiment, je ne comprends pas. Peut-être as-tu d'abord fait une vraie critique, qui te tenait à
coeur, et ensuite, tu as eu des regrets et vite tu as glissé un compliment ? Si c'est cela, tu as tort. Un livre, ça se critique. Et chaque critique peut être intéressante.
Je ne sais pas si l'action traîne. Je ne m'en rends pas compte. J'ai eu l'impression qu'il se passait tant de choses dans cette histoire ! J'ai été amenée à réduire le texte initial, à le condenser, à le resserrer sur l'intrigue, j'avais l'impression que ce lieu, cette situation me donnaient trop d'idées. Peut-être ai-je trop appauvri l'intrigue, mais alors ça, j'ai du mal à m'en rendre compte.
Tu regrettes que les personnages soient des filles. Ca, je le comprends. Mais il y a tant de héros masculins dans les livres ! (D'ailleurs je suis étonnée mais jusqu'à présent je n'ai reçu que des lettres de garçons : n'y a-t-il que des garçons à Genève ?) Et comme je suis une femme, je me suis investie dans ces deux filles qui sont un peu deux moitiés de moi-même. Mais il me semble que les garçons peuvent se sentir des personnages un peu analogues : celui qui sait tout, celui qui ne sait rien.
A ta question, il me semble déjà avoir répondu en partie. Je dis "en partie" parce que le "pourquoi" des choses est toujours un mystère, quand il s'agit de création. Il me semble que dans une lettre précédente je vous ai parlé de mon parcours de petite fille affolée pendant la guerre, et apaisée par un grand-père conteur d'histoires, puis de mère de famille raconteuse d'histoires pour ses enfants, puis enfin d'auteur. Je crois que beaucoup d'auteurs ont vécu , enfants, quelque chose de douloureux qu'ils tentent de surmonter, d'apaiser, ou de dire. On écrit en partie pour l'enfant que l'on a été. Les mots font beaucoup de bien.
Je t'embrasse,
Evelyne
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avril
2001 
Chère Evelyne,
Je m'appelle Nathalie et j'habite à Bernex (Genève). J'ai lu ton livre et il est très bien. Je l'ai bien aimé parce que j'aime
les livres longs.
Pourquoi n'aimais-tu pas lire quand tu étais petite ?
Bisous ! A bientôt !
Nathalie
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Enfant, je n'aimais pas lire :
Parce que pour les jeunes, à l'époque, il y avait un choix de livres très
restreint. Dès qu'on avait huit ou neuf ans, on nous proposait des livres
presque sans images, longs, au rythme lent, pleins de descriptions, bref,
des livres souvent difficiles. Pourtant certains d'entre eux étaient très
beaux, mais il fallait déjà être bon lecteur pour les apprécier. De nos
jours, la production de livres pour les jeunes s'est considérablement
enrichie, et elle s'est adaptée à tous les goûts, tous les styles de
lecteurs. De mon temps, il n'y avait aucune action autour du livre, comme
"la Bataille des Livres", les maîtres ne nous donnaient guère le goût de
lire. Je crois aussi que les livres me faisaient peur, comme je me sentais
fragile, angoissée, je craignais que les mots - qui ont un pouvoir
redoutable - ne réveillent en moi des peurs que je voulais enfouir. Souvent,
les "mauvais" lecteurs sont des lecteurs qui ont peur de la vie. Voilà.
Merci pour ton mot.
Je t'embrasse,
Evelyne.
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avril
2001 
Bonjour Evelyne, je m'appelle Max, je suis en 5ème
primaire et j'habite à Genève. Je n'ai pas lu votre livre mais je me réjouis de le lire. Toute ma classe me dit que le livre est
super. Je me réjouis de vous voir. J'ai aimé lire le "Pionnier du nouveau monde",
"Jacouba, chasseur africain"et "Au gringo's bar". Alors à bientôt.
A quel âge avez-vous voulu être écrivain ?
Max
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Mon Dieu, Max, je n'ai lu aucun des livres que tu me cites !
J'ai commencé très tard à écrire des livres. Jamais je n'aurais pu croire que je ferais cela un jour : en classe, j'étais mauvaise élève, et longtemps je n'ai pas aimé lire... Mais le jour où je m'y suis mise
- je devais avoir dix ans - je n'ai plus jamais cessé. Les auteurs sont presque tous de grands lecteurs.
Je crois pourtant que mon goût de l'écriture est né bien plus tôt, des histoires que l'on m'a racontées quand j'étais petite. J'ai vécu des périodes très douloureuses quand j'étais enfant, et les contes que mon "pépé" me racontait me faisaient tant de bien. C'était comme un pansement pour l'âme. Depuis lors j'ai toujours adoré les contes et quand j'ai eu des enfants je leur en ai racontés et inventés beaucoup. Un jour
- ce devait être en 1977 - j'ai ouvert la radio par hasard et j'ai entendu un éditeur pour enfants dire qu'il recevait trop peu de textes français, qu'il était obligé de traduire des textes anglais ou américains. Il a conclu son interview par la phrase suivante :"Vous qui m'écoutez, si vous avez des histoires à m'envoyer, n'hésitez pas ! Mais sachez qu'une histoire pour enfants, ça ne se fait pas en deux minutes, ça se travaille énormément. Ne m'envoyez que des textes sur lesquels vous aurez beaucoup travaillé." Alors j'ai tapé à la machine les petites histoires que j'inventais pour mes gosses, je les ai envoyées à plusieurs éditeurs, un peu au hasard, j'ai reçu de nombreuses réponses négatives, et puis un éditeur m'a pris une histoire, et voilà, j'ai continué.
J'avais 37 ans.
J'ai hâte de vous rencontrer, et de voir comment se déroule une gigantesque
Bataille des Livres !
A bientôt !
Evelyne
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avril
2001 
Chère Evelyne,
Nous nous appelons Delphine & Marine et nous voulons vous dire que, sans vouloir vous faire de la peine, nous nous sommes un peu ennuyées en lisant Chlaganoir. C¹est sûrement parce que ça n¹est pas notre genre de
livre : d¹habitude, nous lisons plutôt "Harry Potter",
"l¹Histoire sans fin"... du genre sorcellerie ... quoi.
Mais à part ça, cela nous fait très plaisir d¹entrer en contact avec vous.
Avez-vous déjà écrit ou l¹intention d¹écrire un livre qui tourne un peu autour de la
sorcellerie ?
Amitiés
Delphine & Marine
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Chères Delphine et Marine, ne croyez pas me faire de peine, je trouve très bien que vous me disiez franchement ce que vous pensez de
Chlaganoir. Et vous savez, ça ne m'étonne pas vraiment, parce que les réactions à propos de ce livre sont très tranchées. Il y a ceux qui adorent, ceux qui s'ennuient, et cela, même parmi les adultes ! Certains entrent dans le récit, d'autres restent extérieurs.
Moi par exemple, j'avoue que je suis restée plutôt extérieure à "Harry Potter"!
J'ai écrit beaucoup de petites histoires de sorcières mais pour les plus jeunes. Quand j'écris pour les plus grands, d'habitude, j'utilise l'humour pour décrire le quotidien. Mais on ne sait jamais... Un jour peut-être une histoire de sorcellerie pour plus grands s'imposera à moi. Je ne vais pas chercher les histoires, j'attends toujours qu'elles viennent à moi.
Amitiés,
Evelyne
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avril
2001 
Bonjour Evelyne,
Je m¹appelle Aidan. Je suis à l¹école de Vailly à Genève. J'ai aimé votre livre. Je veux vous demander si vous écrivez vos livres toujours avec un autre auteur, comme Guy Jimenes pour Chlaganoir.
Je me réjouis de vous lire. A bientôt !
Aidan
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Non, Aidan, je n'écris jamais avec d'autres . Une exception cependant, une exception d'importance, les scénarios de la bande dessinée Tom-tom et Nana, que nous faisons à deux. Ca nous aide beaucoup, mais dans ce cas-là, nous savons où nous allons, nous connaissons déjà notre petit univers, nos personnages, nous avons une connivence. Dans le cas de
Chlaganoir, ce fut un peu le hasard qui nous conduisit à écrire à deux voix. Peut-être pourrai-je vous expliquer comment cela s'est fait lors de notre entrevue ? Disons que j'avais écrit l'histoire, nous avions donc une base, Guy et moi, et nous l'avons retravaillée ensemble.
A bientôt !
Evelyne.
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